Road-trip au Kazakhstan.
Cela fait quelques jours que les mosquées ont remplacé les églises orthodoxes. Que les plaines arides et plates ont remplacé les vertes et ondoyantes collines. Seule la Volga, rendue invisible par la planeur du paysage, casse cette monotonie. Elle a creusé la plaine et verdi le désert. Il n’y a pas de doute : nous sommes bien à la frontière Kazakh.
Des mouches suceuses de sang nous assaillent alors que nous faisons la queue pour passer la douane. La chaleur est étouffante, nous suons à grosses gouttes dans le van qui s’est transformé en four. Un orage éclate, aussi imprévisible que rapide. Le ciel se zèbre d’éclairs avant de laisser place à l’implacable soleil.
Pour la première fois depuis le début du road trip, nous sommes les étrangers. Autant physiquement que culturellement. Les yeux des locaux se sont bridés rapidement et leur peau s’est brunie. Nous attirons le regard et un douanier, curieux, nous fait passer devant tout le monde. Notre maison à roulettes les fait rire. Ils la fouillent, plus par curiosité que par nécessité. Difficile d’imaginer que nous ayons parcouru tous ces kilomètres jusqu’à leur pays !
Nous faisons nos premiers mètres en terre Kazakh et nous sommes ébahis par la diversité et le nombre d’animaux : troupeaux de chameaux, de chevaux, de vaches, de « moutons-aux-grosses-fesses » comme nous les appelons. Il s’agit en fait de poches de graisse jouant le même rôle que la bosse du dromadaire. Cette explosion de vie est due au delta de la Volga, zone immense, verte et humide qui se termine dans la mer Caspienne.
Dès que nous nous en éloignons, le désert reprend ses droits : sableux, jaunâtre, végétation rase et sèche. Les locaux vivent avec leurs troupeaux dans de petites maison en terre, parfois brutes parfois peintes en blanc. Seul l’existence d’un puit leur permet de survivre dans de telles conditions.
Nous trouvons la mer Caspienne grâce aux indications des habitants du coin, éleveurs de dromadaires, grâce à leur mimes humoristiques. Les gens sont souriants et « vrais ». Et pour cause, pas un touriste ne s’aventure ici !
Nous faisons le pari de rallier la mer d’Aral depuis la mer Caspienne. Une « traversée fantastique » dans le désert de 3 jours. Aucune route sur notre gps, uniquement une carte, une boussole et les indications des locaux qui s’arrêtent à chaque fois pour s’assurer que tout va bien et nous proposer de l’eau.
Notre russe basique que nous avons acquis depuis plus d’un mois nous sert encore : ici, on parle russe et Kazakh. Nous suivons des petites pistes sableuses et poussiéreuses. Notre van n’est pas fait pour ce type de terrain, on manque de s’ensabler plusieurs fois mais on s’en sort plutôt bien en dégonflant nos pneus.
Nous constatons les méfaits de la mondialisation : bouteilles de vodka et paquets de chips jonchent régulièrement les bords de piste. Dans le désert, suivez les déchets, vous ne vous perdrez pas !
La nuit venue, le ciel s’allume de millions de petites étoiles. La voie lactée n’est freinée ici ni par la pollution lumineuse ni par le relief. Elle a le loisir de s’exprimer en grand : elle apparaît d’un côté de l’horizon et disparaît de la même façon à 180°.
Un soir, nous tentons d’enlever un protège disque bruyant. Première fois que nous essayons notre cric, acheté avant de partir. La roue est enlevée, le van bascule et se retrouve bloqué contre le sol. La nuit tombe, des scorpions sont de sortie et nous voilà à creuser à la cuillère à soupe pour remettre notre roue en place !
A la sortie du désert, nous tombons sur un petit village dans lequel nous faisons le plein d’eau à une petite source. Pour l’eau de source, si elle est fraîche c’est qu’elle vient des profondeurs et donc qu’elle est bonne. Voilà 10 mois que nous suivons cette règle et aucun soucis à déclarer !
La mer d’Aral est difficilement accessible : des dunes nous empêchent de nous approcher. A pied, le terrain est plat et vaseux. Elle disparaît d’année en année, laissant une auréole salée sur son passage, témoin de sa taille d’antan. Au détour d’un petit village, 3 « mamas » nous font signe de nous arrêter afin que nous les acheminions à la prochaine ville. Elles rangent le van manu militari, y posent leurs gros sacs pour s’asseoir dessus. Leurs rires nous accompagnerons pendant une quarantaine de kilomètres.
Nous rejoignons la ville de Turkistan, faisons nos courses dans son bazar labyrinthe où des milliers d’yeux étonnés nous suivent. Il va falloir s’y habituer ! Une construction nous interpelle : le magnifique mausolée de Yasaui qui émerge du désert en périphérie de la ville.
Nous gagnons par la suite le large fleuve Syr Darya, nous aidant à supporter la température, excessive pour 2 « blancs » comme nous. Il y a même des arbres pour s’abriter du soleil ! Un troupeau de cheval nous rejoint un soir et partage notre bain.
A Shimkent, au sud du pays, nous sommes hébergés par Gaëlle, une expat venue habiter là grâce aux hasards de la vie. Au restaurant, des locaux nous offrent à manger et à boire en nous remerciant de venir visiter leur pays ! Quel accueil !
Nous poursuivons notre route vers l’est, notre bolide poussé par le vent chaud du désert. Au loin, l’horizon se déchire. Des monts enneigés percent la brume de chaleur et donnent le vertige aux plaines Kazakh.
D’ici quelques jours nous serons au Kirghizstan, ses montagnes nous appellent, promesses de fraîcheur et de points de vue !
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Bonjour, ça donne très envie et on rêve d’y passer, dans notre road-trip Paris-Mongolie en van, mais par où etes vous entrés au Kazakhstan ? La traversée de la Russie semble un peu compliquée ?
Merci en tout cas de partager ce beau voyage !
J’ai vraiment adoré votre récit. J’envisage de partir au Kazakhstan (parmi d’autres pays) en 2021, je ne manquerai pas de relire cet article magnifiquement écrit, bravo pour le style d’auteur !
Bastian
Le road-trip d’Aubin et Hélène est vraiment superbe et leur récit très immersif, n’est-ce pas 🙂 ?
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